Biography "Songs of Exile"

Abdelli Abderrahmane est un chanteur, auteur et compositeur algérien. Pendant la guerre d'indépendance algérienne, alors que sa mère est encore enceinte, le village de ses parents, Kennour, est bombardé par l'aviation française. Ils sont contraints de fuir vers la commune de Behalil à Afir, qui borde la grande forêt de Mizrana en Kabylie, où Abdelli est né. Un an plus tard, la famille est à nouveau contrainte de se rendre dans une ville située le long du littoral méditerranéen, appelée Dellys. C'est la première expérience d'exil d'Abdelli, un problème qui a jeté une ombre importante sur toute sa vie.
Dellys devient le lieu de naissance de sa carrière musicale, la mer Méditerranée étant une forte source d'inspiration. Il fabrique sa première guitare à partir d'un bidon d'huile vide, d'une planche de bois et d'un fil de pêche, et n'a que seize ans lorsqu'il fait ses débuts au Festival de l'indépendance algérienne en 1974.
Abdelli découvre la mandole après avoir entendu le musicien chaabi Chaïd Moh-Esguir (qui deviendra son maître). C'est ainsi que naît son premier album Ayem-yema, sorti en 1986. Mais comme tant d'autres artistes kabyles, Abdelli se heurte à des obstacles bureaucratiques qui l'empêchent de s'exprimer librement dans sa langue maternelle, le berbère. Frustré par ces contraintes injustes, imposées à de nombreux artistes kabyles qui se voient interdire de jouer dans les concerts et les théâtres, il choisit de s'exiler.
En septembre 1986, il s'envole pour le Danemark, via Bruxelles, avec l'espoir et les rêves d'une nouvelle vie. Malheureusement, cette aventure se termine brutalement par un refus d'entrée à la frontière, sans explication raisonnable. L'injustice algérienne, qu'il pensait fuir, semblait se cacher derrière chaque porte. Abdelli se retrouve seul, abandonné et désorienté, comme le ressentent de nombreuses victimes de l'exil. En transit à Bruxelles, il part avec sa mandole pour explorer le centre-ville et passer le temps.
Au cours de son exploration, il rencontre un guitariste qui joue dans la foule à la Gare du Nord (Bruxelles). Le musicien, apercevant la mandole d'Abdelli, l'encourage à prendre sa place. Abdelli ferme les yeux et commence à chanter en kabyle. Tout le monde a applaudi avec beaucoup d'enthousiasme, dit-il : "J'ai été très ému et touché par leurs chaleureux encouragements. Cela m'a fait beaucoup de bien. Ils m'ont donné envie d'aimer et de respecter ce que je pouvais faire encore plus qu'avant".
Par la suite, un jeune Maghrébin du nom de Farid a encouragé Abdelli à jouer à la Grand Place. Il lui promet que c'est "là où tous les musiciens du monde, de passage à Bruxelles, viennent jouer". Pour le remercier de ce conseil, Abdelli lui propose de partager la moitié de ses gains avec lui. Farid lui répond qu'il n'a rien fait d'exceptionnel pour mériter un tel traitement. Abdelli croit encore aujourd'hui que Farid était un ange gardien envoyé d'en haut à une époque de déplacement et de solitude.
En fait, c'est à un jet de pierre de la Grand Place qu'Abdelli a rencontré son futur bon ami Henri Bernard. Henri s'est approché de lui et lui a demandé en quelle langue il chantait. Après avoir appris qu'il s'agissait du kabyle, Henri lui a dit qu'il connaissait leur histoire et leur lutte légitime et pacifique pour la reconnaissance de leur culture berbère. Abdelli apprendra plus tard qu'Henri était un syndicaliste et le fondateur de l'AQL (Association du Quartier Léopold).
Découvrant qu'Abdelli ne savait où aller ce soir-là, Henri l'a invité à dîner dans un café marocain local, tenu par un Berbère de Berkane et fréquenté principalement par des Riffains. Abdelli est invité à se produire, et bien que la langue berbère soit initialement partout au nord du Sahel et des îles Canaries (Libye, Tunisie, Algérie, Maroc, etc.), les clients ce soir-là ne comprennent pas les paroles. Il faut dire qu'au fil du temps, la langue berbère a perdu son originalité / s’est transformée / par l'introduction d'autres langues, comme l'arabe, le français et l'espagnol.
Au fil des années, Abdelli et Henri sont devenus des amis proches. Henri l'a accueilli à bras ouverts dans sa famille ; il l'a nourri, hébergé et encouragé à réaliser ses rêves d'artiste. Abdelli est devenu un membre à part entière de la famille, devenant plus tard le parrain du fils d'Henri.
Inspiré par les encouragements et les conseils d'Henri, Abdelli poursuit sa carrière de musicien. En 1989, il enregistre son album New Moon, qui sortira plus tard en 1995 sur le prestigieux label britannique Real World, créé par Peter Gabriel. C'est le début de sa carrière internationale, puisqu'il est ensuite invité à se produire dans le monde entier, de l'Angleterre au Canada, des États-Unis à l'Europe, en passant par le Pakistan... Il a notamment été invité par Yehudi Menuhin et Ravi Shankar à participer au festival "From the Guitar to the Sitar" à Bruxelles. Depuis, Abdelli a participé à de nombreuses collaborations avec des artistes tels que Loreena McKennitt, Natacha Atlas et Hossam Ramzy. Il a également composé la musique du film Beyond Gibraltar/ Au-delà de Gibraltar.
Abdelli a été invité à assurer la première partie de la tournée "Growing Up" de Peter Gabriel en 2002. En 2003, il a sorti son deuxième album, Among Brothers, sur le label Real World. Cet album a remporté le prix du "meilleur album de 2003" dans la catégorie "musique du monde" décerné par le journal belge Le Soir. Le succès d'Abdelli avec Among Brothers a conduit à d'autres tournées mondiales, l'emmenant, lui et ses musiciens, au Pakistan, au Maroc, aux États-Unis, au Canada, en France et en Suisse. Sans oublier les grands festivals tels que le Festival de jazz de Montréal, le Festival Grand Performances de Los Angeles et le WOMAD, pour n'en citer que quelques-uns.
En 2008, Abdelli a arrêté les tournées pour travailler sur un nouvel album, Destiny. Avec des enregistrements de Lahore (Pakistan), Montréal et Bruxelles, cet album se concentre également sur l'exil, la perte et la nostalgie à travers la musique kabyle, tout en mélangeant des influences modernes et traditionnelles du monde entier. Cet album, Songs of Exile, a commencé peu après l'achèvement de Destiny. Abdelli a déposé tout le matériel de studio dans une boîte avec l'idée de la rouvrir plus tard. Cependant, avec la mort soudaine de son grand ami Henri Bernard en octobre 2008, il s'est senti obligé de le revisiter plus tôt que prévu.
Il voulait créer un album à la mémoire d'Henri, qui mette en lumière les sentiments liés à l'exil, l'exode, l'abandon de sa maison et les souvenirs manquants de son enfance. Henri lui-même était très attentif à l'exil et à la souffrance des autres. Enfant, on l'appelait "le fils de l'étrangère", car sa mère tchèque s'était réfugiée en Belgique pour y travailler dans les années 30. En 1940, elle s'est enfuie dans le sud de la France, cette fois pour échapper à l'occupation nazie, tandis que son mari résistant se cachait. Avec cette histoire personnelle, il n'est pas surprenant qu'Henri ait pris Abdelli sous son aile et l'ait encouragé à poursuivre sa carrière musicale en honorant sa véritable langue maternelle. Abdelli a apprécié ce geste d’amitié, à un moment où la discrimination et l’injustice l’avaient déstabilisé/ emporté / et laissé seul en terre étrangère.
À l'origine, Abdelli voulait que l'album ne contienne que des voix et la mandole, car c'est ainsi qu'Henri préférait entendre Abdelli jouer. Cependant, comme le projet a été partagé avec d'autres musiciens, chaque ami a ajouté un parfum de son pays d'origine au mélange. Avec une telle collaboration d'artistes talentueux désireux de s'impliquer, comment Abdelli pouvait-il refuser ? Le résultat est un constat des tristes problèmes qui assombrissent ce monde, mélangé et élevé par l'inspiration et l'unité des différentes cultures. Un hommage mérité à M. Henri Bernard et à tout ce